mercredi 11 août 2010

Pakistan : des ONG soupçonnées d'extrémisme


Face à la pire crise humanitaire de l'histoire du Pakistan, les organisations caritatives proches des islamistes semblent les plus efficaces pour venir en aide aux 3 millions de victimes des inondations qui ont déjà fait 1500 morts. Résultat : l'ONU et Washington s'inquiètent.

Suite aux inondations qui ont plongé le Pakistan dans la pire crise humanitaire depuis 80 ans, les organisations caritatives islamiques ont été les plus efficaces à réagir, inquiétant Washington et l'ONU qui les soupçonnent d'extrémisme.

La crainte est montée d'un cran avec l'intervention depuis plusieurs jours d'associations caritatives islamistes, dont certaines sont soupçonnées d'entretenir des liens avec des activistes comme Jamaat-ûd-Dawa. Cette organisation humanitaire islamique est interdite depuis décembre dernier par l'ONU pour ses liens supposés avec Lashkar-e-Taïba, accusé par l'Inde d'avoir perpétré les attentats de Bombay en 2008.

Ces islamistes reconvertis en humanitaires se pressent auprès des populations sinistrées, pour arriver avant les secours officiels qui peinent à apporter de l'aide et gagner ainsi en popularité. Comme ce fut le cas en 2005 après le séisme au Cachemire qui avait fait 75.000 morts. En effet, depuis le début de la crise la plupart des victimes dénoncent le manque d'efficacité du gouvernement et du président Zardari, qui préfère laisser l'armée gérer la situation.

La fondation Falah-i-Insaniat, proche de Jamaat-ûd-Dawa, a par exemple mis en place treize campements d'aide et six camps médicaux. Une dizaine d'ambulances fournissent les soins d'urgence et plusieurs volontaires procèdent à l'évacuation des habitants dans les régions frappées par le désastre. «Les organisations religieuses nous aident davantage», souligne à l'agence Reuters Ghulam Haider, un chauffeur de taxi de 25 ans, dont sa maison a été balayé par les inondations.

«Un Pakistan radicalisé renforce la menace terroriste»


Pour l'ONU et les États-Unis, il est permis de craindre que les groupes islamistes et leurs branches militantes, puissent profiter de la catastrophe. «Nous espérons tous que les militants ne profiteront pas des circonstances pour marquer des points», déclare l'envoyé spécial des Nations unies au Pakistan, Jean-Maurice Ripert, dans une interview au Monde.

Jean-Maurice Ripert estime que l'ONU doit aider le gouvernement pakistanais face aux inondations pour anticiper un renforcement des extrémistes qui voudraient tirer parti du «pire désastre naturel» que le pays ait connu. Côté américain, Anthony Cordesman, conseiller de l'administration Obama pour l'Afghanistan et le Pakistan, craint que cela ne rende «le Pakistan encore plus vulnérable à l'extrémisme. Et un Pakistan radicalisé renforce la menace terroriste».

Mais d'autres observateurs doutent que ce scénario puisse avoir lieu, comme Mariam Abou Zahab, spécialiste du Pakistan, interrogée par la chaîne France 24. «S'ils viennent au secours de la population, on ne va quand même pas le leur reprocher! Tous ceux qui peuvent se mobiliser le font, ces groupes n'ont pas toujours de mauvaises intentions ». Et insiste sur le fait que «ce n'est pas parce que les États-Unis envoient de l'alimentation halal que les Pakistanais vont devenir pro-américains».

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