samedi 9 avril 2011

La Bourguiba mania fait son grand retour en Tunisie


La célébration de l'anniversaire de son décès revêt cette année, un caractère spécial, dans le cadre de la réhabilitation du « combattant suprême », qui a conduit à l’indépendance du pays en 1956.

L’événement en Tunisie cette semaine est sans aucun doute, la célébration en grande pompe du 11ème anniversaire de la mort du père de l'indépendance Habib Bourguiba. Une première après 23 ans de règne de Zine El Abidine Ben Ali qui, après l'avoir destitué en novembre 1987, s'était attaché à l'effacer de l'Histoire.

En cette année 2011, au moment où la Tunisie s’apprête à écrire une nouvelle page de son Histoire, l’héritage de Bourguiba est très présent. L’ancien leader semble susciter un engouement sans précédent depuis la révolution du 14 janvier. Même s’il reste un personnage controversé, idolâtré par les uns, et décrié par les autres, celui qu’on nommait le « combattant suprême » arrive, onze ans après sa disparition, à fédérer. Comme s’il fallait pour reconstruire une unité, que les Tunisiens se retrouvent autour de valeurs sûres.

En effet, Bourguiba a su fédérer toutes les volontés tunisiennes et il a su forcer toutes les résistances, tribales, religieuses, culturelles, pour propulser le pays dans la modernité. En témoigne l’unanimité qui se dégage autour de l’une de ses réalisations phare, l’émancipation de la femme, et la promulgation du Code du Statut Personnel (CSP). "C'est l'homme qui a bâti la Tunisie moderne. Son cursus n'est certainement pas exempt de zones d'ombres, mais globalement c'est un parcours très positif", explique à l'AFP le ministre de l'Education Taieb Baccouche.

Mais l’homme suscite encore des critiques. La plupart de ses « détracteurs » l’accusent d’avoir été le théoricien, voire le praticien de la dictature. Il est vrai que par son narcissisme démesuré et le culte de sa personnalité, Habib Bourguiba a institué un régime monolithique, qui a vite dévié au despotisme avec l’institution de la présidence à vie en 1975. La fin de son règne (1978 à 1987), a plongé le pays dans le chaos économique et politique, enfantant ainsi les dérives du Bourguibisme : le régime de Ben Ali. Pour le journaliste tunisien Ali Laïdi Ben Mansour « l’Histoire retiendra que la vraie nature de l’organisation du pouvoir sur laquelle s’est appuyé Ben Ali a été mise en place par Bourguiba ».

Or, le temps semble reléguer peu à peu les dérives autoritaires de Bourguiba aux oubliettes, surtout quand on les compare à celui de son successeur. Et à l’heure de la révolution 2.0 que vient de connaître la Tunisie, le premier Président de la République tunisienne, fait fureur sur le web. D’innombrables vidéos de ses discours refont surface sur Facebook et YouTube. C’est que les conceptions visionnaires, ses discours fleuves à la verve unique, semblent presque faire l’unanimité, en cette période jugée incertaine, en proie à une stabilisation politique et sociale vacillante.

La jeunesse tunisienne révolutionnaire se plonge dans l’ère bourguibienne comme pour comprendre comment la Tunisie a basculé dans le règne de la médiocrité 23 ans durant.

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