vendredi 20 juillet 2012

Le président Marzouki adresse un message rassurant à la communauté tunisienne en France


Le président Marzouki a adressé un message rassurant à la communauté tunisienne établie en France avec laquelle il avait eu une rencontre, mercredi soir au Petit Palais à Paris.

Dans un court discours d'une vingtaine de minute, le président tunisien a affirmé que la situation parfois tendue dans le pays est un élément tout à fait normal dans une phase de transition à l'instar de ce qui se passe dans tous les pays du monde.
Il a affirmé aux membres de la colonie tunisienne qu'il est parfaitement conscient de leurs préoccupations ''étant donné que j'étais l'un d'entre vous'', a-t-il dit.

M. Marzouki a assuré que le gouvernement ne ménagera aucun effort pour répondre aux attentes de la communauté tunisienne établie en France. Il a notamment évoqué le problème des immigrés clandestins qu'il a promis de rapatrier dans les meilleures conditions. 

Marzouki a aussi appelé les Tunisiens établis en France à investir en Tunisie pour participer au développement de l'économie de leur mère patrie.


mardi 1 mai 2012

En marge du meeting de Nicolas Sarkozy avec des militants UMP mécontents


Habituellement c’est la Tour Eiffel qui attire la foule.  Mais ce 1er mai sur le Pont d’Iéna, les gens convergent vers le meeting de Nicolas Sarkozy, Place du Trocadéro.  Ils viennent de tous les côtés. De la Place de l’Arc de Triomphe, du Champ de Mars, de l’Avenue de Varsovie, tous affluent vers un même point. Un drapeau tricolore à la main, un tee-shirt à l’effigie du candidat de l’UMP, des ballons bleu-blanc-rouge.   Des panneaux bleus NS2012 leur indiquent même le chemin à suivre pour arriver au lieu du rassemblement.
Le quartier est quadrillé par les camions de CRS qui orientent les sympathisants UMP vers les côtés. Mais rapidement tous les côtés sont bouclés et il n’est plus possible d’accéder à la manifestation.  Sur l’avenue Kléber, à 200 mètres de la Place du Trocadéro, une femme d’une soixantaine d’années est déçue : « voilà trois quart d'heures  que je tourne autour de la place pour rien, impossible d’y accéder».

Elle n’est pas la seule à exprimer son mécontentement.  Un homme à la quarantaine s’énerve devant un CRS stoïque : « Je suis venu de loin et vous ne me laissez pas entrer ». Un autre s’agite en colère : « Il y a un problème démocratique, on a le droit d’aller manifester » hurle-t-il. Frisant le fanatisme, un homme propose même aux policiers d’entrer à la place d’un militant sorti plus tôt du meeting.
Les agents des forces de l’ordre expliqueront quelques minutes plus tard aux plus calmes: « les gens suffoquent à l’intérieur, c’est pourquoi on ne laisse plus personne passer».  L’organisation de l’UMP n’a pas laissé de place aux retardataires.  Le parti a affrété des centaines de bus venus de toute la France pour mobiliser ses militants.  
Le meeting touche à sa fin et les dizaines de milliers de personnes quittent la masse compacte qu’ils formaient autour de Nicolas Sarkozy. Une jeune femme en sort soulagée : « On est mieux ici, on étouffait à l’intérieur » dit-elle.  Une militante UMP libérée de la foule discute avec un homme à vélo qui voulait à tout prix l’intégrer.  Sur le ton de la plaisanterie, elle lance : « Il faut une carte de vrai travail».  Son interlocuteur sourit : « Ceux qui sont au chômage ne peuvent pas passer, c’est ça ? ».
Les militants discutent du chiffre de 200.000 personnes présentes qu’a annoncé Nicolas Sarkozy en ouverture de son discours. Certains sont ravis et persuadés de la véracité de la parole du Président, d’autres un peu plus dubitatifs.  Le chiffre est invérifiable mais selon certaines sources policières la place du Trocadéro ne peut contenir qu’un maximum de 30.000 personnes.
Un Parisien curieux qui était à quelques mètres de candidat de l’UMP s’amuse de ce chiffre: « Le Président a commencé son discours par un mensonge ! ».  Il ressort surpris de ce rendez-vous : « J’ai l’habitude des meetings mais c’est la première fois que je ressens ça ».  Il s’explique : « Je n’ai jamais été aussi proche des paroles de l’Evangile Nicolas, il dit des choses tellement étranges. On se sent tellement affolés, on regarde autour de soi et on voit des gens qui deviennent une masse prête à en découdre » dit-il avec humour.   L’UMP a gagné son pari, le rassemblement a été un succès, il ne lui reste plus qu’à gagner dimanche soir. Mais ça, c’est une autre histoire.
Olfa Khamira & Fella Adimi

lundi 30 avril 2012

François Hollande à Paris : « Mes amis, la victoire je la veux ! »

Ce dimanche au Palais Omnisport de Bercy s’est tenu le dernier meeting parisien du candidat socialiste. Après une semaine de campagne marquée par les polémiques et le score du FN, l'heure était à l'unité et au rassemblement devant une salle comble et enflammée.


Souriante, le style décontracté, une femme retrouve un ami dans l’immense salle de la capitale où se trouvent 22.000 personnes : « J’attends le 6 mai pour fêter mes 50 ans » dit-elle. La victoire, les militants et les sympathisants socialistes y croient dur comme fer. Ils n’ont que ça aux lèvres. Et ils attendent avec impatience leur candidat.

16 heures. François Hollande arrive par un côté opposé à la scène dans un Bercy bondé telle une rockstar, serrant des mains, signant des autographes. Un long drapeau français qui fende la foule en deux est déroulé par le staff. « Je vous attendais depuis si longtemps ! Depuis des années ! » lance le candidat socialiste à son public.

Arrivé en tête au premier tour avec 28,6% des voix, François Hollande a fustigé les méthodes de son adversaire pour tenter de séduire les 17,9% d'électeurs qui ont choisi la candidate du Front national, Marine Le Pen. "Mes amis, la victoire, je la veux (...) mais pas à n'importe quel prix, pas celui de la caricature, du mensonge", a-t-il jugé. "Je veux reconquérir les hommes et les femmes en colère, qui parfois s'abandonnent, oui, 100 fois oui. Mais promettre ou se compromettre, mille fois non".

Nicolas Sarkozy n’est jamais explicitement nommé, dans la bouche de François Hollande, il est le candidat sortant, « l’autre » ou encore « il ». Et à chaque fois que le candidat socialiste évoque Président de la République ou sa politique, c’est toute la salle qui hurle son mécontentement et qui s’agite. « Qu’est-ce que vous voulez ? Protéger les fortunés ou les enfants de la République. Moi, j’ai choisi.» scande le candidat de la gauche à une foule en furie.

« La répétition d'un mensonge n'a jamais fait une vérité », a-t-il poursuivi, se faisant plus acerbe. "Mais quand on est encore président de la République pour sept jours - sept jours ! -, le premier devoir c'est de respecter la vérité." La salle parisienne exulte aux cris des «François président!», parfois remplacé par des « On va gagner» et des olas. Pendant le discours, le socialiste a très souvent été interrompu par ses partisans.

Hollande a dénoncé «ceux qui craquent des allumettes, qui allument des mèches, ceux qui jouent avec le feu, ceux qui mettent l'étranger au cœur de cette campagne, ceux qui mettent en cause les pauvres parce qu'ils seraient des assistés, ceux qui mettent en cause une religion, qu'ils regardent avec méfiance ».

A Bercy, François Hollande s’est posé en rassembleur : « Je veux demain être votre président. Ici, partout. Et que l’on me regarde comme celui qui a permis le changement, l’espérance et le rassemblement de tous les républicains ». Il se fait drôle parfois « Moi, à la différence de l'autre, je ne vous demande pas de m'aider, je ne lance pas des SOS. Je vous demande à tous d'aider votre pays, d'aider la République ».

Après avoir entonné la Marseillaise et alors que les militants allaient quitter la salle, le candidat socialiste s’offre un rappel et reprend le micro. Pour mobiliser d’abord: «Nous devons nous battre comme si nous étions en retard alors même que nous sommes en avance ». Et pour la première fois, preuve peut-être qu’il se voit déjà à l’Elysée, Hollande appelle à la mobilisation pour les législatives: «Je ne veux pas anticiper mais après il y a les législatives. Il faudra donner une majorité forte et cohérente».

Pour finir, François Hollande rappelle l’importance du rendez-vous du 6 mai et « veux que les générations nouvelles se disent que 2012 a été une date historique pour la République ».

Olfa Khamira et Fella Adimi

lundi 9 avril 2012

Aujourd'hui j'ai assisté a un débat avec le conseiller spécial du Premier ministre tunisien. Mondher Ben Ayed a essayait d'assurer les Franco-tunisiens inquiets de voir la tournure qu'a pris l'Après-Révolution depuis l'arriver d'Ennahda au pouvoir. Donc voici ses mots: " notre programme est la construction d'un Etat démocratique qui respectera toutes les libertés" . " Nous voulons la création d'un environnement serein et trouver une plateforme de coexistence ou vivrait toutes les sensibilités politiques". Bref, il nous a menti... #9avril

dimanche 15 janvier 2012

A Paris, les Tunisiens fêtent le premier anniversaire de la révolution


A travers une « marche pour les libertés », les Tunisiens de la capitale ont souhaité célébrer à leur manière, la date du départ de Ben Ali.

Dans une ambiance à la fois festive et revendicative, quelque 800 personnes ont manifesté, ce samedi 14 janvier, de la place de la République à la place de la Bastille. Habillés du drapeau de leur pays, les Tunisiens de Paris ont défilé dans le froid, chantant l’hymne national, faisant des youyous.
Mais plus qu’une simple célébration, pour les associations organisatrices, il s’agissait avant tout de s’associer aux luttes encore en cours dans le pays. Tout en rendant hommage aux martyrs, des pancartes rappelaient qu’il fallait rester « fidèles au sang des martyrs » et rester « vigilants » quant aux récents acquis.

Des affiches reflétaient l’inquiétude de certains qui accusent Ennahdha, le parti islamiste, de s'attaquer aux libertés. Un jeune homme brandit une affiche: « Ne touchez pas à notre université », ceci en allusion aux conflits qui ont eu lieu en décembre dernier lorsque des militants islamistes radicaux avaient investi la faculté des Arts et des Lettres de La Manouba, à 15 km de Tunis, pour réclamer le droit aux étudiantes de porter le niqab. Aussi, un groupe criait en arabe « Pas de califat, pas d’émir » en référence aux propos du Premier ministre nahdaoui Hamadi Jebali qui avait appelé à constituer un « 6ème Califat » dans le Monde arabe.

Les partis politiques se sont bousculés à cette marche qui était plus un cortège de partis politiques qu’une manifestation populaire. Des représentants du CPR, d’Ettajdid, d’Ennahdha, et même le député à la Constituante d’Ettakatol Selim Ben Abdessalem étaient au rendez-vous.

Les manifestants entendaient aussi condamner l’ingérence étrangère dans leur pays, à l’image de cette femme d’une quarantaine d’années qui avançait avec une poussette en criant : « Qatar dehors, les Etats-Unis aussi », un homme d’un certain âge s'indignait : « La France a soutenu Ben Ali, nous ne voulons plus qu’elle se mêle de nos affaires », l’ingérence leur fait trop rappeler que leur dictateur Ben Ali avait le soutien de la France jusqu’à ses dernières heures au pouvoir.

Les manifestants qui craignent la montée au pouvoir d’une autre dictature, ne cessent de clamer tout le long du cortège: « nous ne voulons pas d’un nouveau Ben Ali ». Les slogans d’unité reviennent aussi beaucoup, le même monsieur d’un certain âge remarque : « Ils nous ont divisé ». Par « ils » il faut comprendre, Ennahda. Le pays semble divisé entre progressites et islamistes depuis que le parti Ennahda a remporté plus de 40% des voix à l’assemblée constituante en octobre dernier.

Entre tristesse et fierté, les Tunisiens de Paris espèrent toujours voir les objectifs de la révolution, plus de dignité, de liberté, de travail, se réaliser. Plusieurs jeunes s'agacent, déçus « par un gouvernement qui n'a encore rien fait pour lutter contre le chômage ». « On s’attendait à ce que le gouvernement trouve un boulot pour le peuple et c'est le peuple qui lui a trouvé un boulot » dit un jeune tout sourire.

Co-écrit avec Fella Adimi http://fellaadimi.wordpress.com/

vendredi 13 janvier 2012

Tunisie An I: que reste-t-il des promesses de la révolution?


Le 14 janvier 2011, après 23 ans de dictature, Zine el-Abidine Ben Ali était chassé du pouvoir à l’issue d’un mois de manifestation populaire inédite. Première révolution du « Printemps arabe », c’est aussi celle qu’on juge souvent la plus aboutie. Or, a-t'elle tenue ses engagements?

La Tunisie s’apprête à souffler, la première bougie du renversement du président Zine el-Abidine Ben Ali. Une année après la fuite du dictateur, les Tunisiens ont appris les règles du jeu démocratique. Pourtant, la situation économique alarmante et les tentatives de contrôle de l’État par le parti islamiste Ennahdha sont loin d’être rassurantes. Moins d’un mois après la formation du gouvernement, le pays peine a retrouver sa sérénité. Alors que reste-t-il des promesses de la révolution ?

Premier constat depuis l’exil saoudien de Ben Ali, le pays a changé. En octobre dernier, le peuple tunisien a participé à ses premières élections libres de son Histoire. Si le parti islamiste Ennahda est sorti vainqueur de ce scrutin, c’est un "modéré laïc", Moncef Marzouki, un médecin farouchement opposé au régime Ben Ali, qui a été élu à la présidence par l’Assemblée nationale constituante formée suite à ces élections. Or depuis, l’opinion publique s’inquiète de l’improvisation et les mauvais débuts du gouvernement du nahdaoui Hamadi Jebali. En effet, Ennahda n’a pas élaboré de programme économique révolutionnaire, aucune rupture par rapport au régime Ben Ali. Et personne ne sait combien de temps ils vont rester au pouvoir puisque le mandat de la constituante n’a pas encore été décidé.

Mais aujourd’hui, les Tunisiens attendent toujours de récolter les fruits de leur révolution. Le chômage n’a pas baissé, la sécurité n’est toujours pas assurée, aucun des rêves ne s’est réalisé. Les défis à venir continuent de mitiger les succès d’une transition plutôt réussie et illustrée par la mise en place d’institutions légitimes. En effet certains « vices » qui caractérisaient et ont entraîné la chute de l'ancien régime sont toujours là: corruption, chômage et manque d'expérience démocratique.

Deuxième constat, le pays est au bord de la faillite et peine à se relever. La délicate situation économique et la hausse importante du nombre de chômeurs ne rassurent pas la population. Les manifestants, galvanisés par les succès et par l’assurance qu’ils peuvent peser dans le débat public, ne quittent plus la rue. Pas de jour sans manifestation, ni sans grève. Quel que soit le domaine, les demandes sont innombrables et les attentes immenses.
Pour que l’on puisse évaluer la révolution tunisienne, il faut prendre en compte la situation des régions de l’intérieur qui ont déclenché le mouvement. Un an plus tard, elles se retrouvent dans la même situation économique et sociale, voire pire. Le nouveau président Moncef Marzouki a lui-même évoqué un risque de « suicide collectif » si la situation économique ne se redressait pas.

D’ailleurs le phénomène d’immolation n’a cessé d’augmenter. Au cours des six mois qui ont suivi la mort de Bouazizi, au moins 107 Tunisiens ont tenté de se suicider par immolation, rapporte la BBC. Elles correspondent à un cri de détresse de personnes désespérées qui souhaitent attirer l’attention sur la situation économique catastrophique des régions du centre. La différence avec le suicide de Mohamed Bouazizi, c’est qu’aujourd’hui ce ne sont plus des jeunes mais des pères et des mères de famille qui s’immolent.

La plupart des Tunisiens estiment cependant qu'il sera difficile de revenir sur une liberté d'expression chèrement acquise. Le nombre de médias, de partis politiques et d'associations constitue "un bon indicateur" de la vitalité démocratique en Tunisie.
Si la liberté demeure aujourd'hui incontestablement le premier acquis à conserver, l'économie et la croissance sont indispensables pour garantir la survie de la révolution.

samedi 17 décembre 2011

Révolution Tunisienne: An I

Aujourd'hui nous fêtons le premier anniversaire de la Révolution Tunisienne. Tout à commencé le 17 décembre 2010, lorsque Mohamed Bouazizi embrasait son corps imbibé de liquide inflammable devant le siège du gouvernorat de Sidi Bouzid.

Il n'était ni un héro, ni un pauvre type, mais un être de désespoir, révolté contre sa dignité bafouée.

O Bouazizi, où que tu sois aujourd’hui, en enfer ou au paradis, soupçonnes-tu seulement combien ta mort, elle, a tout changé? La Tunisie s’est métamorphosée à jamais et moi aussi. Merci et que Dieu ait ton âme!

samedi 29 octobre 2011

Je comprends mieux les Tunisiens qui ont voté Ennahda.

La Tunisie a voté et Ennahda a gagné. J’ai mis plusieurs jours avant de comprendre le vote de mes compatriotes Tunisiens. Sans doute mon coté français avait du mal a intégrer qu’un parti islamiste modéré soit-il puisse arriver au pouvoir (le débat en France sur la laïcité a laissé des traces !).

La journée de dimanche était juste magnifique. C’était avec une immense fierté que les Tunisiens se sont massivement rendus aux urnes, le 23 octobre pour le premier scrutin libre de leur histoire. Toutefois le lendemain, je me suis réveillée avec une légère gueule de bois. Depuis le scrutin, j’essaye de comprendre ce vote. Je sillonne donc les rues de la capitale et je discute avec les gens. Au cours de mes discussions, je ne constate ni peur, ni crainte, rien tout cela. Et encore moins « l’ombre d’un hiver islamiste » comme le prétende les médias français !

Ennahdha est le parti vainqueur à 41%. Je respecte ce choix démocratique. Cela signifie que la question identitaire était toujours d’actualité en Tunisie. Le mouvement de Rached Ghannouchi a capitalisé sur un désir de retour de l'islam dans l'espace social, pour une garantie de la liberté religieuse. Ce bon résultat confirme aussi l'existence en Tunisie d'une majorité conservatrice que j’ignorais. Car ce qui réunit tous ces hommes, rasés de près ou barbus, et ces femmes, voilées ou non, est la religion. Un attachement qui s'explique par des années de répression. La plupart des Tunisiens estiment qu’il faut restaurer l'authenticité et l'identité arabo-musulmane du pays après les années bourguibisme et de bénalisme.

Durant mes entretiens, j’ai découvert que l’électorat « islamistes » était très éclectique. Des femmes non voilées, des hommes qui aiment boire de temps en temps, la classe moyenne et même quelques intellectuels. Le réservoir électoral initial qui se limitait, dit-on, à quelque 20 000 militants, s’est élargi grâce aux adhérents post-14 janvier, mais la campagne électorale a aussi permis au mouvement de ratisser large. Pour Khomsi, 52 ans chauffeur routier : « Ennahda va offrir ce que la révolution tunisienne a demandé : du travail, de la liberté, une démocratie et l'arrêt de la corruption ».

En effet, le parti jouit d’une très bonne image car pour beaucoup de Tunisiens, Ennahda est celui qui a payé le plus lourd tribut à la dictature de Ben Ali en raison du passé militant de ses dirigeants. Au sortir de 23 ans d’un régime corrompu, les Tunisiens sont très méfiants à l’égard des partis politiques. Un parti islamiste modéré, qui a souffert de la répression, inspire davantage confiance.

Conscient d'avoir à encore convaincre, Ghannouchi multiplie les déclarations apaisantes depuis sa victoire. «Chacun vivra selon ses convictions dans le cadre de la loi», «le mode de vie des Tunisiens ne sera pas touché», a-t-il encore assuré. Après vingt ans d'exil forcé pour les membres de cette formation, Ennahda s'est employée à présenter un visage modéré et moderne, se réclamant ouvertement du modèle turc, pendant la campagne électorale. Le parti ne veut pas imposer la charia (loi coranique que la Libye voisine veut prendre comme source de sa législation) et ne remettra pas en cause le statut de la femme tunisienne, le plus avancé du monde arabe. « On va l’essayer un an ou deux et si ça ne marche pas, on lui dira: dégage!», explique Sofianne, un commerçant de 30 ans.

Ennahda a été élu démocratiquement : il faut lui donner une chance. Sa pratique du pouvoir nous dira si les accusations de double discours dont il est l’objet sont fondées. Sans compter que, dans une démocratie naissante, un message basé sur la religion est souvent plus accessible qu’un message purement politique,

A regarder le chemin parcouru, cependant, je considère que l'avenir qui s'offre à la Tunisie est non pas une menace, mais une chance. La société tunisienne est depuis longtemps sécularisée et n’a pas l’intention de céder sur ses acquis, notamment en matière de droits des femmes. Je reste donc optimiste !

mardi 18 octobre 2011

Tunisie : Tensions entre islamistes et laics avant les élections


A l’heure où Ennahdha apparaît comme la force politique la mieux structurée du pays, l’inquiétude gagne les rangs des militants laïcs quant au danger que constituerait une éventuelle remise en question du projet moderniste du pays.

Depuis une semaine, un face-à-face à distance entre «laïcs» et «religieux» met mal à l'aise la classe politique, car elle recentre le débat sur la place de la religion au cœur de la campagne. En effet, tout a commencé par la diffusion du film d’animation franco-iranien Persepolis par la chaine Nessma. Le film contient une représentation de Dieu - ce que l’islam proscrit – et a causé un tollé parmi les spectateurs. Vendredi, après la fin de la prière, des milliers de salafistes sont montés vers la Kasbah. Le cortège se composait de quelques d'intégristes réclamant le retour aux sources de l'islam et l'instauration d'un califat. Devant la polémique, Nabil Karoui, le patron de Nessma, a été contraint de présenter ses excuses aux Tunisiens. Il fait aussi l’objet d’une procédure judiciaire, de même que ceux qui ont traduit le dessin animé en arabe.

En réplique à la mobilisation des islamistes, le camp laïque a organisée dimanche, une marche pour la défense de la liberté d’expression. Placée sous le mot d'ordre "Aâtakni" ("fous-moi la paix"), près de 2500 personnes ont réclamé un Etat civil après les élections. «La Tunisie pour tout le monde. Oui à un État civil», scandaient la foule. Dans le cortège, les femmes étaient très présentes. Certaines ont la bouche bâillonnée par du ruban adhésif. «Toutes les femmes tunisiennes ont peur pour leurs filles, leur liberté», explique une manifestante. « Je me battrais jusqu'à la mort », jure Lilia, professeur de philosophie. A noter que peu de femmes voilées ont rejoint le cortège. Pour la plupart des manifestants, l'initiative de Nessma TV est qualifiée de «maladroite». « Ce n’est pas grave du tout, car tout le monde s’est déjà fait une représentation de Dieu dans sa tête », explique Sofiane, 39 ans.

Depuis l’affaire Persepolis Ennahda qui est présenté comme les favoris des élections reste sur ses gardes. Et les deux principales formations de centre gauche, Ettakatol et le Parti démocrate progressiste restent étrangement silencieuses. Toutefois ce clivage entre «laïcs» et «religieux» gêne la nouvelle classe politique, qui cherche à dégager des consensus pour réussir la transition vers la démocratie. On sent qu'il ne faudrait pas grand-chose pour que la transition démocratique, exemplaire jusqu'à présent, dérape. Nombreux sont les Tunisiens qui retiennent leur souffle.

Ennahdha est-il vraiment une menace pour la Tunisie? Une certitude: même si ce parti arrive en tête il n'aura pas la majorité à lui tout seul. Impossible avec le mode de scrutin. Force est de constater que, a cinq jours de ce rendez-vous électoral historique et crucial, rares sont ceux qui sont réellement convaincus par un choix de vote. Beaucoup ignore que l’enjeu principal de cette Assemblée est la rédaction d’une nouvelle Constitution qui préservera les libertés des citoyens et évincera tout retour possible de la dictature. Car la première préoccupation des Tunisiens est surtout économique.

jeudi 6 octobre 2011

Constituante 2011 : Ou va la Tunisie ?

Neuf mois après la chute du régime de Zine el Abidine Ben Ali, le pays initiateur des révolutions arabes s’apprête à se rendre aux urnes pour élire une assemblée constituante.


Les Tunisiens s'apprêtent à faire l'apprentissage de la démocratie. Le 23 octobre les électeurs participeront pour la première fois à des élections libres pour désigner l'Assemblée chargée de rédiger la Constitution de la IIe République.

Longtemps confrontés à l'hégémonie d'un parti unique, les Tunisiens auront à faire un choix difficile parmi une multitude de partis et de candidats indépendants, la plupart méconnus des électeurs. Face à cette profusion, les Tunisiens restent dubitatifs et indécis, même si les cinq ou six formations politiques historiques devraient rafler le plus gros des sièges de la constituante, selon les observateurs et les derniers sondages --interdits depuis samedi dernier.

Sur les 111 partis légalisés dans leur grande majorité après "la révolution du 14 Janvier", 81 seront en lice dans les 33 circonscriptions électorales (dont six à l'étranger) pour ce scrutin à la proportionnelle. Selon les dernières statistiques de l'Instance supérieure indépendante pour les élections (ISIE), 1.541 listes comprenant près de 11.000 candidats se disputeront les 217 sièges de la future Constituante.

S'il est difficile de prévoir où va la Tunisie dans le contexte actuel, il est néanmoins possible d’identifier quelques orientations électorales. C’est ce qu’a voulu démontrer le Think Tank Emergens/Rabii-Tounes, en organisant un débat à Paris, afin de positionner 3 des principales formations politiques : Ennahdha, Ettakatol et Parti Démocratique Progressiste (PDP).

Chaque intervenant a présenté son programme et a souligné les points de convergence avec son voisin. Le représentant d’Ennahda Samir Dilou a affirmé que l’idéologie de son parti est aujourd’hui en conformité avec les exigences des temps modernes, il fait même état de modestie : « Nous ne voulons pas être les seuls au pouvoir », assure-t’il. Car à la veille de la Constituante, Ennahda est en tête de tous les pronostics. Les islamistes jouissent en effet d’une grande notoriété et s'appuient sur le plus important réseau de soutien dans la société.

Durant le débat, Samir Dilou a évité les sujets controversés et inquiétants quant aux changements que le parti islamique prévoit dans la société tunisienne, si Ennahda obtenait la majorité. Le discours est uniquement orienté sur l’éradication de la corruption et le droit à l’emploi pour les Tunisiens. Des thèmes qui ont alimenté la révolution du 14 janvier.

Sahbi Grira, le représentant du PDP a axé son discours sur "deux grands programmes": création d'emploi et développement des régions intérieures du pays. Le PDP prône une politique d'investissements publics massifs, de soutien aux PME, et vise le doublement des investissements directs étrangers en Tunisie en assouplissant les textes les régissant. En matière sociale, le PDP a plaidé pour une "fiscalité équitable", notamment par la création d'une "TVA solidaire" et la revalorisation du salaire minimum (Smig) à 340 dinars.

Ettakatol, a travers son chef de file pour la circonscription France Nord Selim Ben Abdessalem, s’est engagé a adopter une orientation politique renforçant la démocratie et la lutte contre les inégalités sociales et régionales. Parmi les autres thématiques abordées par le candidat, citons l’égalité femmes /hommes, la séparation du politique et du religieux et l’accès à la culture pour tous, même dans les régions les plus reculés. Ettakatol a proposé également de consacrer environ un milliard de dinars, prélevé sur le budget de l'Etat de l'année 2012, à la création de 100.000 emplois dans le secteur public, une solution d'urgence pour réduire le chômage des jeunes.

La discussion s’est animée lorsque le modérateur a demandé s’il existait un pacte entre Ennahda et Ettakatol comme le prétendait le PDP. En effet, le nom de Mustapha Ben Jaafar serait cité pour succéder à l’actuel président par intérim Foued Mbazaa après les élections du 23 octobre. Bien que la question fût claire et directe, la réponse de Mustapha Ben Jaâfar, présent lors du débat, était imprécise et évasive. Il ne dit pas qu’il va accepter une alliance avec Ennahdha, mais il ne rejette pas non plus, à l’instar du PDP.

Toutefois, les trois formations politiques présentent au débat n’ont pas su répondre aux interrogations des Tunisiens présent dans la salle sur le texte fondamental d'organisation des pouvoirs publics du pays. Quelles seront les modalités de rédaction de la future constitution ? Quelles seront les préférences des partis sur les portefeuilles ministériels à pourvoir ? C’est sur ce premier aspect que la Tunisie devra relever le défi de la démocratie.

Illustration : les logos des partis tunisiens ; cartographie des partis tunisiens (Fhimt.com).

mardi 21 juin 2011

A #Botzaris36, l'Etat de droit n'existe pas




Les migrants de Lampedusa ont été chassés de l'immeuble du 36 rue Botzaris par les CRS sur ordre de l'ambassade de Tunisie. Ils ont pris leurs quartiers au parc des Buttes-Chaumont à Paris.

Dans le parc des Buttes-Chaumont, une trentaine de ressortissants tunisiens abrités essayent tant bien que mal de se protéger de la pluie. Les yeux rouges de fatigue, les traits tirés et le corps aminci, ils regardent passer les Parisiens d'un air désemparé.

Depuis plusieurs mois ces migrants sont dans la capitale, sans papiers, sans toit, sans ressources. Après avoir systématiquement fait l'objet d'expulsions des différents endroits où ils avaient pu trouver refuge,ils se sont abrités, le 31 mai, dans un immeuble situé au 36, rue Botzaris dans le 19e arrondissement de Paris. Mais les réfugiés ont été expulsés manu militari le jeudi 16 juin, sur demande de l'ambassade de Tunisie.

Pourtant, les Tunisiens espéraient se placer sous la protection de l'ambassade de leur pays d'origine, afin d'éviter toute procédure d'évacuation. «C'est à nous ici, ça appartient au peuple tunisien», explique Saddam, 19 ans, originaire de Zarzis et arrivé en France il y a 3 mois.

Depuis une dizaine de jours, la tension ne cessait de croître aux abords du 36 rue Botzaris, en raison des découvertes étonnantes faites dans le bâtiment. Cet ancien foyer pour étudiants, propriété de l'État tunisien, hébergeait jusqu'à la chute du régime Ben Ali la section française du RCD, le parti de l'ancien président renversé le 14 janvier dernier.

Sur place, les personnes présentes ont retrouvé des armes et surtout des archives, retraçant de multiples opérations illicites ordonnées par les milices de Ben Ali. Des documents qui risquent de gêner à la fois les autorités françaises et tunisiennes.
Le 15 juin, une partie de ces archives partent dans les mains de l’avocate franco-tunisienne Soumaya Taboubi, au nom du Collectif des Tunisiens de France, une association récemment créée pour protéger les documents.

En 24 heures, le lieu a été évacué par les CRS à coup de gaz lacrymogène, sur demande de l'ambassade et placé en extra-territorialité. Pourquoi cette précipitation? Selon Marianne2.fr, un juge d'instruction s'apprêtait à perquisitionner les locaux, suite à une information judiciaire contre X visant Ben Ali, pour blanchiment d’argent en bande organisée. L'annexion du bâtiment par l'ambassade empêche alors toute mesure d'instruction judiciaire française sur cette affaire. Aujourd'hui, le 36 rue Botzaris est désormais sous surveillance par des vigiles et des chiens et ce, jour et nuit. Au frais du contribuable tunisien.

Depuis leur expulsion du bâtiment, les réfugiés passent leurs nuits dehors. Aucune solution de substitution n’a été trouvée, ni par la Mairie de Paris, ni par l'ambassade de Tunisie. Grâce à Twitter, et le hachtag #Botzaris36 ( mot-clé qui permet de repérer ceux qui relaient l'information), une solidarité citoyenne s'organise mais ne suffit pas. Les conditions de vie des réfugiés Tunisiens de Lampedusa ne cessent de se dégrader d'heure en heure. L'urgence est réelle!

it photo: @Paul_Da_Silva sur Twitter)

jeudi 28 avril 2011

A Paris, des migrants tunisiens loin de l’eldorado

L’air hagard et fatigué, les migrants tunisiens sont des dizaines à errer dans les rues du 19ème arrondissement de Paris depuis que la police les a chassés la veille, mercredi, du parc de la Villette. Ces Tunisiens fraîchement arrivés de Lampedusa sont dispersés dans les rues et les parcs du nord est parisien.

Sami* et Farid* sont arrivés dans la capitale il y a une quinzaine de jours. Ils ne parlent pas français. Pour ne pas attirer l’attention de la police et des riverains, ils évitent d’être dans des groupes. Farid vit dans un foyer associatif, il ne parvient pas à joindre des membres de sa famille : « depuis que je suis arrivé, j’appelle mais je tombe sans arrêt sur messagerie. » dit-il avec amertume. Son ami habite chez son frère à Belleville. Mais nombreux sont les migrants qui dorment dehors.

Ces amis d’enfance originaires de Zarzis dans le sud de la Tunisie ne sont pas venus ensemble. « J’ai fait le voyage avec la journaliste qui a fait un reportage pour Envoyé Spécial » dit Sami qui parle d’un périple éprouvant. Pour Farid, la traversée a été longue, il a mis 48 h pour atteindre Lampedusa.

Suite aux troubles qui ont précédé la fuite de Ben Ali le 14 janvier dernier, Farid s’est évadé de prison. Il restera vague sur les raisons de son incarcération mais il est sûr de lui :
« je ne retournerais plus jamais en Tunisie. Du moins tant que la justice restera la même » confie t-il. Le jeune homme a trop peur de son passé.

Arrivé dans le pays des droits de l’Homme, ils n’imaginaient pas un accueil et des conditions de vie aussi rudes. Ils ne se doutaient pas non plus que leur quotidien serait fait de faim et de misère. Ils espèrent trouver du travail rapidement pour retrouver une certaine dignité et mettre fin à ces longues journées de marche dans Paris pour échapper la police.

Deux hommes appartenant à la secte des Témoins de Jéhovah sont allés à la rencontre de ces sans papiers. Les deux jéhovistes prêchaient en arabe auprès de ces Tunisiens perdus. Farid et Sami n’ont jamais entendu parler de cette religion. « Ils croient qu’on va devenir chrétiens » plaisante Farid. « Les Tunisiens ne tomberont pas dans ce panneau ».

Depuis la révolution, plus de 20 000 personnes ont quitté la Tunisie pour rejoindre l’Europe. Des migrants de sexe masculin pour la plupart mais aussi des femmes. D’après de nombreux témoignages, certaines villes du Sud tunisien se sont vidées de leurs hommes. Face à cette nouvelle vague migratoire, la France et l’Italie ont vu leurs relations se tendre. Les deux pays demandent à l’Union Européenne une révision de l’accord de Schengen.



Olfa Khamira & Fella Adimi


Aussi disponible sur le blog de Fella Adimi : http://fellaadimi.wordpress.com/

* Les prénoms ont été modifiés

jeudi 14 avril 2011

Où en est la Tunisie, trois mois après la chute de Ben Ali?



Les Tunisiens respirent la liberté et aspirent à un lendemain meilleur. Trois mois après la révolution, « C’est Olfa qui le dit » vous propose un petit bilan de la situation.


Le dictateur
Depuis sa fuite le 14 janvier dernier, Zine el-Abidine Ben Ali est en exil en Arabie Saoudite en compagnie de son épouse Leïla en dépit d'un mandat lancé à travers Interpol. Une demande d'extradition adressée par Tunis est restée sans réponse. Plusieurs membres de sa famille et de sa garde rapprochée ont été arrêtés. Sa police politique et le parti qu'il dirigeait, le RCD ont été dissous. Ben Ali fait l’objet de dix-huit actions en justice pour « complot contre la sûreté de l’Etat, l’homicide volontaire et l’usage et le trafic de drogues ».

La liberté d’expression
Naguère muselée, la presse est redevenue libre. Mais, dans un espace en révolution, les médias traditionnels tunisiens sont désormais très critiqués. La presse écrite a du mal à se débarrasser de réflexes conditionnés par vingt-trois années de dictature. Un traitement de l'information en deçà de la hauteur des évènements, avec une tendance à mettre en avant le sensationnel et la frivolité au détriment de l’investigation et du travail sur terrain. Pour l'instant, c'est le même paysage médiatique, les mêmes radios et les mêmes télévisions qui existaient sous Ben Ali mais avec cette différence que le débat devient pluriel, des visages interdits apparaissent et s'expriment librement.

Transition démocratique
Le processus de transition vers la démocratie est engagé. Les Tunisiens éliront une Assemblée constituante le 24 juillet au suffrage universel direct. L’objectif principal de la Constituante est de rédiger une nouvelle Constitution d’une part et également choisir un type de régime. Les droits et libertés de l’individu doivent être proclamés, garantis et sanctifiés par la Constituante. La Haute commission chargée de préparer les élections a opté pour un scrutin de listes à la proportionnelle et de la parité hommes-femmes. A l’heure actuelle 51 partis se sont présentés en vue de l’élection mais les tunisiens connaissent très peu de partis mis à part celui de Ben Ali le RCD et le parti intégriste Ennhada.

Les islamistes
Bannis sous Ben Ali, les islamistes prennent doucement leur place sur l'échiquier politique tunisien. Légalisé le 1er mars, le mouvement Ennahda a affirmé qu’il ne s’opposait pas au CNP (Code du statut personnel), tout en défendant le voile. Le parti islamiste présentera des candidats aux élections du 24 juillet. Plusieurs experts s'attendent à ce qu'ils remportent un nombre important de sièges. La ré-islamisation de la société tunisienne, réelle depuis le début des années 2000, s'est surtout fait via le discours wahhabite diffusé par les chaînes satellitaires du Golfe. Reste à savoir quelle est son audience dans la Tunisie d'aujourd'hui.

L'économie
C'est à ce chapitre que le bât blesse. Les récents événements ont ralenti l'économie tunisienne, fortement dépendante du tourisme. Le pays est depuis trois mois dans une conjoncture économique et sociale très délicate, au rythme de la « dégagemania » pratiquée à tort et à travers. L’économie peut encore résister à cette décélération de la machine productive à condition que la situation générale ne s’aggrave pas. Il s’agit donc d’œuvrer pour rétablir la sécurité, la stabilité et la confiance. Pour cela, la réussite de l’élection du 24 juillet va être déterminante.
Si la liberté et la dignité demeurent aujourd'hui incontestablement les premiers acquis à conserver, l'économie et la croissance sont indispensables pour garantir la survie de la révolution.

mardi 12 avril 2011

Egypte: la place Tahrir de nouveau mobilisée



Deux mois après la chute du régime, les Égyptiens sont à nouveau descendus dans la rue, pour exiger le procès de l'ancien « raïs » et l’accélération de la transition à un pouvoir civil.

Il y a deux mois à peine, les Égyptiens voyaient l'armée comme une alliée qui les a aidés à tourner la page sur les trois décennies de l'ère Moubarak. Cette lune de miel est définitivement terminée. Vendredi, pour la première fois depuis la chute de Hosni Moubarak, 100.000 protestataires massés au centre du Caire ont scandé des slogans hostiles aux militaires et réclamé le départ du maréchal Mohammed Hussein Tantaoui, chef du Conseil suprême des forces armées. L'intervention musclé de la police militaire pour évacuer la place occupée par les manifestants, on fait un mort et 71 blessés selon un bilan officiel.

Amnesty International a dénoncé "l'usage excessif de la force par l'armée égyptienne", citant sur la foi de témoignages l'usage de matraques électriques et l'envoi de véhicules blindés qui ont fait de nombreux blessés en entrant dans la foule. L'armée a nié avoir agi avec brutalité et démenti des accusations selon lesquelles elle aurait ouvert le feu sur des manifestants. Elle les a qualifiés de "hors-la-loi" en laissant entendre qu'ils pourraient agir à l'instigation de partisans de Moubarak.

Or, une partie de la jeunesse égyptienne soupçonnent l’institution militaire de protéger Hosni Moubarak et ses proches. A plusieurs reprises ces dernières semaines, l’armée a tenté de mettre au pas ces irréductibles qui exigent de faire table rase du régime. En témoigne la fermeté dont elle a fait preuve dimanche, en faisant condamner à trois ans de prison un simple blogueur accusé d'avoir « insulté » l'institution militaire.

Si l’armée jouit encore d’une certaine popularité au sein de l’opinion, son indulgence vis-à-vis de Moubarak pourrait lui faire perdre son crédit. Face à la pression populaire, le ministre de l'Intérieur, Mansour al-Issawi, a annoncé que l'ex-président égyptien ainsi que ses fils Alaa et Gamal seront prochainement entendus par la justice dans le cadre d'enquêtes portant sur des détournements d'argent public et sur la répression des manifestations anti-Moubarak, lors desquelles 840 personnes ont été tuées. S'ils refusent de comparaître devant le parquet, à une date qui reste à déterminer, « des mesures légales seront prises », a-t-il précisé, évoquant une possible arrestation conformément à la loi.

L’inquiétude est grande chez les Egyptiens, qui réalisent que la révolution est loin d’être terminée.

samedi 9 avril 2011

La Bourguiba mania fait son grand retour en Tunisie


La célébration de l'anniversaire de son décès revêt cette année, un caractère spécial, dans le cadre de la réhabilitation du « combattant suprême », qui a conduit à l’indépendance du pays en 1956.

L’événement en Tunisie cette semaine est sans aucun doute, la célébration en grande pompe du 11ème anniversaire de la mort du père de l'indépendance Habib Bourguiba. Une première après 23 ans de règne de Zine El Abidine Ben Ali qui, après l'avoir destitué en novembre 1987, s'était attaché à l'effacer de l'Histoire.

En cette année 2011, au moment où la Tunisie s’apprête à écrire une nouvelle page de son Histoire, l’héritage de Bourguiba est très présent. L’ancien leader semble susciter un engouement sans précédent depuis la révolution du 14 janvier. Même s’il reste un personnage controversé, idolâtré par les uns, et décrié par les autres, celui qu’on nommait le « combattant suprême » arrive, onze ans après sa disparition, à fédérer. Comme s’il fallait pour reconstruire une unité, que les Tunisiens se retrouvent autour de valeurs sûres.

En effet, Bourguiba a su fédérer toutes les volontés tunisiennes et il a su forcer toutes les résistances, tribales, religieuses, culturelles, pour propulser le pays dans la modernité. En témoigne l’unanimité qui se dégage autour de l’une de ses réalisations phare, l’émancipation de la femme, et la promulgation du Code du Statut Personnel (CSP). "C'est l'homme qui a bâti la Tunisie moderne. Son cursus n'est certainement pas exempt de zones d'ombres, mais globalement c'est un parcours très positif", explique à l'AFP le ministre de l'Education Taieb Baccouche.

Mais l’homme suscite encore des critiques. La plupart de ses « détracteurs » l’accusent d’avoir été le théoricien, voire le praticien de la dictature. Il est vrai que par son narcissisme démesuré et le culte de sa personnalité, Habib Bourguiba a institué un régime monolithique, qui a vite dévié au despotisme avec l’institution de la présidence à vie en 1975. La fin de son règne (1978 à 1987), a plongé le pays dans le chaos économique et politique, enfantant ainsi les dérives du Bourguibisme : le régime de Ben Ali. Pour le journaliste tunisien Ali Laïdi Ben Mansour « l’Histoire retiendra que la vraie nature de l’organisation du pouvoir sur laquelle s’est appuyé Ben Ali a été mise en place par Bourguiba ».

Or, le temps semble reléguer peu à peu les dérives autoritaires de Bourguiba aux oubliettes, surtout quand on les compare à celui de son successeur. Et à l’heure de la révolution 2.0 que vient de connaître la Tunisie, le premier Président de la République tunisienne, fait fureur sur le web. D’innombrables vidéos de ses discours refont surface sur Facebook et YouTube. C’est que les conceptions visionnaires, ses discours fleuves à la verve unique, semblent presque faire l’unanimité, en cette période jugée incertaine, en proie à une stabilisation politique et sociale vacillante.

La jeunesse tunisienne révolutionnaire se plonge dans l’ère bourguibienne comme pour comprendre comment la Tunisie a basculé dans le règne de la médiocrité 23 ans durant.

jeudi 7 avril 2011

#CIVSOCIAL - Twitter au secours des Ivoiriens

En Côte d’Ivoire, les réseaux sociaux n’ont jamais aussi bien porté leur nom. Sur Twitter, grâce au hashtag #civsocial une assistance pratique a été mise en place afin de venir en aide aux victimes et de relayer les appels d’urgence des habitants d’Abidjan.

Très rapidement sur le fil #civsocial, les messages de malade en manque de médicaments, des femmes enceintes sur le point d’accoucher ou encore des blessés à la recherche d’un médecin en urgence se multiplient. Les habitants d’Abidjan s’en servent également pour échanger des informations sur la présence de pilleurs dans la ville.

Guy Manasse, le créateur du haschtag, explique à RFI : « Ayant constaté une dégradation dans l’usage de #civ2010 de la part des partisans des différents partis politiques, j’ai décidé de créer un nouveau fil plus utile et plus positif. »

Face à ce succès, l’ONG ivoirienne Akendewa a décidé d’ouvrir un service de Call Center au Ghana. L’objectif de cette opération Call center est de fournir un centre téléphonique de gestion d’urgence pour les victimes en Côte d’ivoire. En effet, les SMS sont suspendus depuis plusieurs semaines et les populations se retrouvent dans l’impossibilité de recharger leurs lignes téléphoniques.

L’idée est de permettre de joindre facilement et gratuitement des numéros spéciaux pour toute urgence, pour ensuite les diffuser sur Twitter ou elles sont orientées vers des personnes pouvant les aider.

Pour se porter volontaire, il suffit d'envoyer un mail à contact@akendewa.org avec pour objet : Volontaire #civsocial. (Source France 24)

lundi 3 janvier 2011

Les chères vacances d'Obama


Loin des problèmes économiques et des intempéries qui perturbent actuellement la côte est des Etats-Unis, le locataire de la Maison-Blanche passe des vacances luxueuses à Hawaï, pour un montant d'1,5 million de dollars.

Sans surprise, le couple Obama et ses deux enfants ont choisi Hawaï comme lieu de villégiature pour ces fêtes de fin d'année. Le président est né en 1961 dans l'archipel américain, où il a passé une grande partie de sa jeunesse. Et pour des vacances bien méritées, le président américain a choisi pour sa famille et ses amis le confort luxueux d'une villa en bord de mer à Kailua, un village situé à 20 km au nord-est de la capitale, Honolulu. La location est estimée à 3.500 $ la nuit.

L'Administration a pris soin de préciser que c'est la famille Obama qui réglait elle-même la facture. Mais ce sont tout de même les contribuables américains qui paieront le voyage sur Air Force One pour un montant de 1 million de dollars, ainsi que la location d'une villa voisine pour l'armada qui assure la sécurité du président et de sa famille, estimée à 16.800 dollars les deux semaines. S'ajoutent à cela 134.000 dollars, le coût de l'hébergement à l'hôtel Moana pour 24 employés de la Maison-Blanche.

Michelle Obama et leur deux filles sont parties à Hawaï trois jours avant le président sur un avion de l'US Army, le chef de l'Etat ayant souhaité rester à Washington jusqu'à la fin de la session du Congrès et la ratification du traité START. Selon The Hawaï Report, ce vol aurait couté 63.000 dollars en frais de logistique.

Aucun événement public du président n'est prévu pendant le séjour des Obama à Hawaï, qui a été prolongé jusqu'au 4 janvier, a indiqué la Maison-Blanche. Le président Obama a jusqu'ici limité ses déplacements à la base de Marines voisine, où il a fait de l'exercice, joué au golf et rendu visite à des militaires lors de leur repas de Noël. L'année dernière, le Noël du président avait été perturbé par l, un incident qui a occupé tout le reste des vacances de Barack Obama.

mercredi 22 décembre 2010

Avec les perturbations, le covoiturage explose


Alors que les trains et les avions sont pleins, le covoiturage fait désormais figure de véritable alternative à l'occasion des fêtes de fin d'année.

Nombreux sont ceux qui recherchent une alternative au train et à l'avion, fortement perturbés par les intempéries. Et quand les trains sont pleins, le covoiturage est désormais l'option idéale. Sur le site covoiturage.fr, pas moins de 420.000 partages de voitures, seront disponibles jusqu'à fin décembre. Pour de nombreux internautes, c'est une solution simple et économique.

Le covoiturage est une formule qui permet d'optimiser le transport en voiture. Il consiste, pour des personnes qui effectuent le même trajet, à partager le même véhicule. Concrètement, il faut tout d'abord mettre en relation des personnes qui font, en totalité ou en partie, un même trajet. Cette pratique permet aux passagers de faire des économies, en se partageant les frais tels que les frais d'essence, de péage, d'entretien et d'assurance du véhicule. Une vraie économie bienvenue en ces périodes de fêtes, au profit du budget cadeau.

Succès lié à la hausse du carburant

Pour Laure Wagner, responsable communication du site covoiturage.fr, « le succès est directement lié à la hausse du carburant». L'envolée du prix du gasoil expliquerait donc, en partie, le développement exponentiel de cette pratique. Cette annéz, covoiturage.fr a connu une croissance de 150% par an et atteint le nombre de 870.000 adhérents. « Habituellement, nous avons 30 000 requêtes par jour, mais depuis décembre, c'est passé à 60 000 », explique Laure Wagner.

Si l'avantage financier est la première motivation des utilisateurs, les préoccupations environnementales et la facilité d'utilisation des sites spécialisés sur Internet ont aussi relancé l'engouement des Français pour les trajets partagés. Il suffit de quelques clics, pour trouver une voiture ou un passager et effectuer un trajet long ou court. Et pour un coût défiant toute concurrence. Quelques exemples : un Paris-Nantes coûte 25 €, un Toulouse-Montpellier 16€. Un système de notation des conducteurs et passagers permet également de voyager en toute confiance.

Malgré une pratique encore assez récente, le partage de voitures va être amené à se développer davantage à l'avenir car les nouvelles technologies ont participé à l'essor du covoiturage. Avec la multiplication des sites internet, l'offre s'est développée. Désormais, il est possible de faire du covoiturage directement à partir de Facebook ou bien de son Iphone.

vendredi 17 décembre 2010

Rue Myrah, «on ne prie pas dans la rue par gaieté de cœur»



Après une semaine de polémique sur les prières de rue, lefigaro.fr est allé à la rencontre des fidèles de la rue Myrah, dans le XVIIIe arrondissement de Paris. D'ici à la fin 2012, ils devraient être accueillis dans une nouvelle mosqué
e.

lundi 13 décembre 2010

Diversité : les USA lancent une association à Lyon

Selon WikiLeaks, les Américains s'inquiètent d'une discrimination des musulmans qui pourrait susciter des crises et affaiblir l'Hexagone. Le consulat des Etats-Unis s'attache donc à promouvoir la «diversité à la française» à travers une association, une première en France.

Les Etats-Unis restent très impliqués en France sur la question de la diversité. Début décembre, le consul américain de Lyon Mark Shapiro a lancé une nouvelle association baptisée Confluence pour le respect et la diversité, une structure qui s'inscrit dans la politique des Etats-Unis pour la promotion des minorités et particulièrement de la minorité musulmane.

Ce projet est le résultat d'un «partenariat entre la région Rhône-Alpes et le Département d'Etat américain» autrement dit le Quai d'Orsay version US. Selon les messages diplomatiques révélés par WikiLeaks, les Américains craignent en effet que la discrimination des musulmans suscite des crises répétées et fasse de la France un «pays faible» et «un allié moins performant».

Reproche américaines à «la France chrétienne et blanche»

Cette association ambitionne «de créer, d'animer et de gérer à Lyon, un centre dédié à la diversité et à la lutte contre les discriminations», selon le magazine . Mais pourquoi cet intérêt pour nos minorités ? La France, avec 4 à 5 millions de musulmans, forme un cas à part vu de Washington. Dans l'une des notes diplomatiques publiées par le site Wikileaks, les Etats-Unis reprochent à «la France blanche et chrétienne de ne pas considérer ses compatriotes à la peau sombre et musulmans comme des citoyens à part entière».

Considérant que «les populations défavorisées restent une cible évidente pour les recruteurs extrémistes», l'ambassade évoque dans une note du 25 janvier 2007 de possibles aides financières pour lutter «contre les conséquences des discriminations et l'exclusion des minorités en France». Ainsi, l'opération de séduction en direction des banlieues et des Français d'origine étrangère coûte chaque année 3 millions de dollars à l'ambassade des Etats-Unis. La stratégie américaine est simple : financer des projets de renouvellement urbains, des conférences ainsi qu'un programme d'échange permettant à de jeunes musulmans français de visiter l'Amérique.

Ce type de programmes, lancé au lendemain du 11 septembre, vise dans un premier temps à améliorer l'image des Etats-Unis, mais aussi à repérer les talents émergents dans les banlieues. Les Américains souhaitent ainsi renforcer leur présence économique et culturelle en France tout en participant au développement de villes au potentiel ignoré. L'objectif principal des Etats-Unis est d'aider et accompagner les jeunes issus de l'immigration, afin de les éloigner d'éventuelles dérives extrémistes.

Mais Washington s'est également aperçu d'un intérêt politique, en s'assurant les bonnes grâces de ceux qui seront peut-être les décideurs de demain. Chaque année, une trentaine de personnes issues de l'immigration et considérées comme des futurs leaders sont invitées trois semaines aux Etats-Unis pour un séjour de découverte.

Toutefois, les dirigeants de la nouvelle association lyonnaise se défendent d'être des agents au profit de l'Oncle Sam. « Ce n'est ni l'officine des Etats-Unis, ni d'un parti politique. Il s'agit d'un espace de rencontre et de réflexion non partisan », a assuré Abdelaziz Dahhassi, le directeur de l'association au magazine Lyon Capitale.